Étude sur la réussite et l’abandon des études dans les hautes écoles suisses

La maturité gymnasiale permet d’accéder à des études dans une université ou une EPF sans examen complémentaire. Du point de vue de la politique éducative, l’un des objectifs d’une formation gymnasiale est de s’assurer de l’aptitude générale aux études tout en vérifiant que les jeunes atteignent un certain niveau de maturité sociale. Le professeur Franz Eberle vient de réaliser une étude scientifique, dans laquelle il examine jusqu’à quel point cet aspect se reflète dans la réussite des études, quel rôle jouent les différents types de maturité et de hautes écoles et sur quels points il existe un potentiel d’amélioration.

30.01.2025
Auteurs: Martin Fischer, Irina Mayer
Quatre étudiants discutent dans la bibliothèque
Dans le système suisse de formation, le degré secondaire II prépare globalement bien à la réussite dans des études de degré tertiaire. Photo: Adobe Stock

L’étude Réussite et abandon des études dans les hautes écoles, publiée par le professeur Franz Eberle en janvier 2025 sur mandat de la Commission suisse de maturité (CSM), est le prolongement des travaux réalisés par le professeur en 2022 sous le titre Réussite des titulaires d’un certificat passerelle dans les hautes écoles universitaires. Cette dernière établissait une série de comparaisons en se fondant sur les données de l’Office fédéral de la statistique (OFS) entre le taux de réussite des titulaires d’un certificat de maturité et celui des titulaires d’un certificat passerelle. À partir des mêmes jeux de données, l’étude actuelle se concentre davantage sur les titulaires d’une maturité gymnasiale en tenant compte des différents types de maturité et de hautes écoles.

Elle vient compléter les collections publiées par le SEFRI, comblant ainsi une importante lacune. Elle permet d’analyser toutes les voies d’accès à une formation de degré tertiaire relevant de la typologie haute école universitaire (HEU), haute école spécialisée (HES) et haute école pédagogique (HEP) et met en lumière les taux de réussite correspondants.

(Remarque: activer les sous-titres pour la traduction française)

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Bon fonctionnement du couple maturité – haute école

Au moyen des indicateurs que sont le taux de réussite des études (soit le nombre de diplômes obtenus) et le taux d’abandon, l’auteur constate que le fonctionnement est globalement équilibré entre les conditions d’accès spécifiques des hautes écoles, posées par les trois types de maturité (gymnasiale, spécialisée et professionnelle), et les exigences spécifiques des différents types de hautes écoles. De même, la symétrie établie entre les différentes voies de formation menant au degré tertiaire et les solutions passerelles actuelles 1 (de la maturité gymnasiale vers les HES) et 2 (de la maturité professionnelle ou spécialisée vers les HEU) est jugée suffisante. Ainsi, dans le système suisse de formation, le degré secondaire II prépare globalement bien à la réussite dans des études de degré tertiaire. Toutefois, certains éléments problématiques ont été identifiés et ont été assortis de recommandations à l’intention des responsables de la politique de formation.

Conditions cadres relatives à l’examen complémentaire Passerelle

Une amélioration des conditions cadres pour la préparation à l’examen complémentaire passerelle pourrait conduire à accroître le nombre de diplômés. Cette voie étant souvent empruntée par des jeunes issus de milieux non académiques, elle pourrait déployer un effet égalisateur sur le plan social. Par contre, il serait problématique de renoncer à l’examen complémentaire. En effet, le taux d’abandon des études par les titulaires d’une maturité professionnelle est déjà trop élevé à l’heure actuelle, en particulier dans les filières en sciences exactes, en sciences naturelles et en sciences techniques.

Différences entre les exigences des HEU, des HES et des HEP

La symétrie entre les exigences spécifiques des hautes écoles et les conditions d’accès à ces dernières ne doit pas masquer la différence qui existe entre les exigences des HEU d’une part et celles des HES et des HEP d’autre part. Par exemple, les étudiants qui ont obtenu de moins bonnes notes en maturité gymnasiale sont capables de réussir leurs études dans une HES ou une HEP. L’inverse se rencontre moins souvent. Pour les HEP, la question qui se pose concerne les conditions minimales, en termes de compétences générales et spécialisées, pour exercer le métier d’enseignant. Les HES, quant à elles, devraient s’interroger pour savoir si elles ne mettent pas trop l’accent sur les performances académiques au détriment des compétences pratiques.

Trop de titulaires d’une maturité professionnelle renoncent à des études en HES

D’après les données analysées, environ 60% seulement des titulaires d’une maturité professionnelle se lancent dans des études dans une HES. Compte tenu du fait que quelques-uns d’entre eux entrent dans une HEP (avec examen d’admission) ou dans une école supérieure, Franz Eberle estime qu’il existe un potentiel non exploité d’environ 35% de personnes qui pourraient décrocher de hautes qualifications.

Différences cantonales en matière de taux de maturités

Dans l’ensemble, les différences cantonales observées en matière de taux de maturités sont non seulement en partie injustifiées, mais également inversement proportionnelles au taux de réussite des études et corrélées au taux d’abandon des études. C’est pourquoi l’auteur de l’étude plaide pour une harmonisation des procédures d’admission au gymnase pour ce qui est de la sélectivité et de la qualité. Il estime en outre qu’il faudrait harmoniser davantage les exigences relatives à l’obtention du certificat de maturité gymnasiale et aux procédures de promotion durant la formation. Selon lui, le nouveau règlement sur la reconnaissance des certificats de maturité gymnasiale (RRM/ORM 2023) offre une base formelle en vue d’une meilleure comparabilité. La question des taux de maturités doit également tenir compte du bon équilibre entre les trois types de maturité. L’amélioration du taux global de maturités ne devrait pas reposer exclusivement sur les gymnases; elle pourrait être obtenue simplement en allongeant la durée des études, sans baisse du niveau d’exigence.

Portrait d'un homme avec des lunettes

Franz Eberle, né à Flums en 1955, a obtenu en 1996 son habilitation d’enseignant en gestion d’entreprise et en pédagogie économique à l’Université de Saint-Gall. En 1999, il a obtenu une chaire en pédagogie gymnasiale et économique à l’Université de Zurich. De 1979 à 2001, il a enseigné au gymnase à plusieurs reprises. Il a toujours veillé à intégrer la pratique scolaire dans ses activités d’enseignement et de recherche. L’analyse de l’accès aux hautes écoles a été le principal axe de ses recherches de ces dernières années. Franz Eberle a été nommé professeur émérite en 2019.