État des lieux de la reconnaissance des qualifications professionnelles étrangères

Les personnes qui souhaitent travailler en Suisse avec un diplôme étranger ont directement accès au marché du travail. Une reconnaissance des qualifications professionnelles étrangères n’est requise que lorsque l’exercice de la profession visée est réglementé par la loi. Sur mandat du SEFRI, le bureau Ecoplan a examiné les réglementations et les procédures de reconnaissance en vigueur, dans l’optique d’identifier les facteurs de réussite et les obstacles en matière d’intégration sur le marché du travail.

08.04.2025
Auteur/e: Sabina Giger
Gros plan sur des mains qui écrivent quelque chose
Les personnes qui souhaitent travailler en Suisse peuvent trouver un emploi dans de nombreuses professions sans être soumises à des dispositions légales particulières. Photo: SEFRI

Les travailleurs étrangers jouent un rôle central sur le marché du travail suisse. Selon l’enquête suisse sur la population active, ils représentaient en 2022 près de 30% des personnes de 25 à 64 ans ayant un emploi. Étant donné que chaque année, le nombre de personnes qui partent à la retraite est supérieur à celui des jeunes qui arrivent sur le marché du travail, l’immigration contribue à répondre aux besoins en personnel qualifié en Suisse. 

Le principe du métier structure le marché du travail

Les travailleurs étrangers qui viennent en Suisse arrivent sur un marché du travail libéral. Il est possible d’exercer nombre de professions sans être soumis à des dispositions légales particulières ni à des démarches administratives poussées. Toutefois, contrairement à beaucoup d’autres pays, la Suisse dispose d’un marché du travail structuré selon le principe du métier, ce qui signifie que les compétences qui doivent être maîtrisées par un professionnel qualifié sont définies dans un diplôme formel. Les employeurs se fient aux diplômes nationaux, auxquels ils sont habitués. Il n’est donc pas toujours facile pour eux d’évaluer correctement des qualifications étrangères. 

Les professions réglementées par l’État

L’État ne réglemente qu’un nombre restreint de professions. L’exercice de ces dernières est réglementé par des dispositions légales qui déterminent clairement le diplôme professionnel requis. Les personnes souhaitant exercer l’une de ces professions avec un titre étranger doivent donc faire reconnaître au préalable leurs qualifications professionnelles. Ces dispositions visent à garantir le respect de normes de formation reconnues comme fondamentales, notamment dans le domaine médical ou dans celui des soins. Elles sont fixées dans des lois ou des ordonnances, le plus souvent au niveau cantonal. Il existe néanmoins quelques professions dont la réglementation est inscrite dans le droit fédéral. 

Les procédures de reconnaissance fonctionnent bien

Selon l’étude réalisée par Ecoplan, la reconnaissance des qualifications professionnelles étrangères fonctionne bien en Suisse. Les coûts de la reconnaissance sont peu élevés et il existe de nombreuses offres d’information et de conseil. Le site internet reconnaissance.swiss, les services de renseignements par téléphone ainsi que les prestations proposées par les offices d’orientation professionnelle, universitaire et de carrière et les organisations à but non lucratif sont particulièrement appréciés. 

Les défis systémiques dans la mise en œuvre de la réglementation et de la reconnaissance des qualifications professionnelles

Pour bien comprendre le propos de l’étude d’Ecoplan, il est nécessaire de faire le lien entre réglementation, reconnaissance et exercice de la profession. Les autorités compétentes en matière de reconnaissance et de réglementation varient en fonction de la branche. 

  • Si, pour l’exercice d’une profession, une loi ou une ordonnance requiert une formation spécifique réglementée par le droit fédéral, c’est une autorité fédérale qui est est chargée de la reconnaissance.
  • Si elle requiert au contraire un diplôme cantonal, c’est une autorité cantonale ou intercantonale qui endosse la responsabilité de la reconnaissance. 

Des défis d’ordre systémique apparaissent, lorsque la réglementation est du ressort des cantons, qui ne procèdent pas toujours de manière uniforme, alors que la Confédération est responsable de la reconnaissance. En effet, les cantons doivent répondre aux besoins régionaux de personnel qualifié en trouvant parfois des solutions pragmatiques. De son côté, la Confédération doit garantir une procédure de reconnaissance uniforme. Dans le même temps, tant la Confédération que les cantons doivent respecter les accords internationaux, tels que l’accord sur la libre circulation des personnes conclu avec l’Union européenne. L’étude montre que les autorités cantonales peuvent réduire les tensions ainsi créées en tenant compte, dans leurs réglementations, des répercussions sur les procédures de reconnaissance.

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Relation entre la réglementation, la reconnaissance et l’exercice de la profession. Source: ECOPLAN

La reconnaissance formelle et les attestations de niveau

Les personnes qui souhaitent exercer une profession non réglementée ont la possibilité de demander une attestation de niveau. Cette dernière permet d’attribuer au diplôme étranger un niveau équivalent dans le système éducatif suisse. 

L’utilité des attestations de niveau ne fait cependant pas l’unanimité. Les employeurs interrogés par Ecoplan accordent davantage d’importance à un certificat de travail ou à une expérience professionnelle en Suisse qu’à une attestation de niveau délivrée par l’État. Les syndicats, en revanche, soulignent que l’attestation de niveau est un instrument important pour classifier les postes dans le cadre des conventions collectives de travail. 

Les difficultés pour les travailleurs

Les travailleurs disposant de qualifications professionnelles étrangères qui demandent une reconnaissance ou une attestation de niveau sont confrontés à différentes difficultés:

  • Ils doivent maîtriser une langue nationale et se renseigner sur les exigences liées à l’exercice de la profession.
  • La procédure est coûteuse et le temps d’attente jusqu’à la décision de reconnaissance est long.
  • Une reconnaissance des qualifications professionnelles ou une attestation de niveau ne constitue pas une attestation de compétences ni une garantie d’emploi. Pour les professions non réglementées en particulier, la recherche d’emploi peut s’avérer difficile, même avec une attestation de niveau, si les qualifications étrangères ne sont pas reconnues comme équivalent à un titre suisse courant, comme le certificat fédéral de capacité (CFC).
  • Lorsque des qualifications professionnelles ne sont pas requises sur le marché du travail suisse, les personnes qui possèdent un diplôme étranger peuvent avoir l’impression que leurs compétences professionnelles ne sont pas reconnues. 
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Différentes interprétations du terme «reconnaissance» d’une qualification professionnelle étrangère en vue de l’accès au marché du travail suisse. Source: ECOPLAN

Les employeurs, des acteurs clés de l’intégration sur le marché du travail

L’étude montre que les employeurs jouent un rôle important lorsqu’il s’agit d’évaluer les compétences des professionnels étrangers. Dans les professions non réglementées notamment, un travail à l’essai peut s’avérer utile pour juger des aptitudes de la personne à occuper un poste.

Dans les professions réglementées, lorsque l’évaluation des qualifications professionnelles étrangères révèle des différences significatives avec la formation suisse, des mesures de compensation permettent de combler les lacunes. Elles prennent la forme soit d’une épreuve d’aptitude, soit d’un stage d’adaptation. Les entreprises peuvent faciliter de telles mesures pratiques en mettant en place des offres correspondantes. 

Les prochaines étapes

L’étude a été initiée par le groupe de travail «certification professionnelle pour adultes» de la Conférence tripartite de la formation professionnelle. Les partenaires de la formation professionnelle vont à présent discuter ces résultats et examiner les éventuelles mesures à prendre dans leurs domaines de compétence respectifs. Leurs conclusions seront discutées collectivement au troisième trimestre 2025. 


Contact
Frédéric Berthoud, SEFRI Reconnaissance des qualifications professionnelles frederic.berthoud@sbfi.admin.ch +41 58 465 58 66
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