Coopération transnationale: l’exemple d’Horizon 2020
Horizon 2020, le 8e programme-cadre de l’Union européenne (UE) pour la recherche et l’innovation, s’est achevé fin 2021. Le succès de la participation de la Suisse a renforcé aussi bien le pôle suisse que le paysage européen de la recherche et de l’innovation.
Le programme-cadre de l’UE Horizon 2020 s’est déroulé de 2014 à 2021. Ses instruments d’encouragement couvraient pratiquement la totalité de la chaîne de création de valeur, de la recherche fondamentale aux applications technologiques en passant par la recherche appliquée.
- Pilier Excellence scientifique: la recherche fondamentale a été en grande partie subventionnée au moyen des instruments établis du Conseil européen de la recherche (European Research Council, ERC) et des actions Marie Skłodowska-Curie (MSCA).
- Pilier Primauté industrielle: le tissu industriel est renforcé à travers des investissements ciblés en recherche et développement de secteurs importants tels que les technologies de l’information et de la communication, les nanotechnologies, les matériaux avancés et les systèmes avancés de production, les biotechnologies et l’espace. Des entreprises novatrices (essentiellement des PME) ont par exemple obtenu un accès facilité aux investissements en capital-risque.
- Pilier Défis sociétaux: Horizon 2020 a fixé sept priorités thématiques visant à trouver des solutions aux défis auxquels nos sociétés sont confrontées.
À l’exception des bourses d’encouragement de projets individuels (ERC et MSCA), une part substantielle du budget global d’Horizon 2020 a permis de subventionner des projets collaboratifs. La plupart des participants à Horizon 2020, soit 85% tous pays confondus, ont participé à ce type de projets. Les actions relevant des défis sociétaux (3e pilier) ont fait l’objet d’appels à projets collaboratifs précisément pour que des équipes de recherche issues de différents pays, en particulier de pays européens, puissent poser des candidatures en commun. En outre, parmi les instruments de financement destinés à encourager l’industrie et les progrès techniques (2e pilier), un certain nombre était dédié aux consortiums de recherche regroupant des équipes internationales.
Les conditions de participation à des projets collaboratifs stipulent que les consortiums de recherche doivent réunir des partenaires issus de différents pays. Dans une majorité de cas, la mise en œuvre de cette clause s’est traduite par des collaborations entre institutions de recherche publiques et entreprises privées. Ces collaborations offraient la possibilité de rapprocher les agendas de plusieurs pays et institutions d’une part et de stimuler les échanges de savoir et d’expériences entre le secteur public et le secteur privé d’autre part.
Les chercheurs de Suisse sont des partenaires de projet appréciés et sont en outre particulièrement efficaces dans la coordination de projets. Prendre la direction d’un projet permet souvent d’accroître son influence sur les travaux et d’avoir accès à toutes les données récoltées. Avec près de 17% des demandes acceptées, les projets dirigés par des équipes suisses sont ceux qui ont enregistré le meilleur taux de réussite.
Exemple de projet collaboratif
Un projet collaboratif réunit généralement des partenaires qui possèdent en matière de recherche et d’innovation des compétences différentes, mais indispensables pour que le projet avance. Un consortium a ainsi été mis en place en neurochirurgie sur le thème de l’imagerie par résonance magnétique peropératoire (iMRI) dans le cadre d’un appel à projets du programme Eurostars. Le but est de mener une IRM peropératoire de la tête en temps réel, à haute résolution et ultra-rapide afin de permettre une navigation sûre et précise pendant une opération du cerveau. Cette IRM, qui peut avoir lieu dans une salle d’opération, a le potentiel de changer radicalement le flux de travail chirurgical, les chirurgiens ayant alors accès à des images cérébrales de haute qualité pendant l’opération. Cinq partenaires issus des Pays-Bas, du Royaume-Uni et de la Suisse ont mis en commun leur expertise et leurs technologies pour réaliser ce projet.
Avantages pour la Suisse
La coopération dans le contexte d’Horizon 2020 a créé de la valeur ajoutée et apporté des avantages non seulement pour l’Europe, mais aussi pour la Suisse. D’après un rapport publié en 2019 par le SEFRI, la participation de la Suisse au programme a contribué à produire davantage de savoir, à renforcer l’économie et à amener des évolutions sociales positives.
Production de savoir: l’activité en matière de publications a été intense, avec pas moins de cinq publications par projet. La coopération transnationale dans les projets collaboratifs, en particulier, a engendré des publications rédigées conjointement par des personnes basées en Suisse et des partenaires basés à l’étranger. Mais les projets collaboratifs ont surtout contribué à développer et à consolider sur le long terme la présence suisse dans certains réseaux internationaux tout en renforçant ces derniers. Horizon 2020 a aussi joué un rôle important pour la formation de la relève dans le domaine de la recherche et de l’innovation en Suisse: en moyenne, chaque participation à un projet a conduit à l’obtention d’un master et d’un doctorat parmi les partenaires suisses. En outre, les participants des hautes écoles ont évalué très positivement l’impact de la collaboration à un projet Horizon 2020 sur leur carrière.
Renforcement de l’économie: les participations à des projets Horizon 2020 ont conduit en moyenne à une hausse du chiffre d’affaires pour environ 30% de tous les participants suisses parmi les grandes entreprises et les PME et à des créations d’entreprises dans environ 10% des participations. De plus, chaque participation à un projet Horizon 2020 a généré en moyenne un emploi et a stimulé le dépôt de brevets. En moyenne, une participation sur deux d’entreprises suisses a permis de déposer un brevet et de développer un projet innovant ayant des chances de succès sur le marché.
Évolutions sociales: de nombreux projets ont contribué à la mise en œuvre ou à l’élaboration de stratégies politiques en Suisse, ou encore à la culture générale de la population.
Avantages pour l’Union européenne
La participation de la Suisse à des programmes-cadres de l’UE n’a pas seulement apporté des avantages et des réussites au pôle suisse de la recherche et de l’innovation, mais a aussi activement contribué à des gains de compétitivité pour l’espace européen de la recherche.
À travers leur implication dans divers projets de lutte contre le réchauffement climatique et la pollution environnementale, les partenaires suisses ont ainsi particulièrement dynamisé le «Green Deal» européen dans le cadre d’Horizon 2020. La spin-off suisse Daphne Technology en est un bon exemple: ses partenaires européens, avec lesquels elle travaille étroitement, se répartissent entre la France, le Danemark, la Suède et la Norvège. Elle est la seule entreprise européenne à proposer une solution à la pointe de la technologie pour éliminer les oxydes d’azote et de soufre émanant des moteurs et des chaudières de bateau, contribuant par là-même à réduire la pollution environnementale dans la navigation maritime.
Sur la période couverte par Horizon 2020, la Suisse a également eu un rôle significatif dans la création et le développement d’infrastructures de recherche européennes et internationales. Elle a ainsi livré des technologies clés pour la construction du réacteur expérimental ITER. Le Swiss Plasma Center exploite en effet l’un des trois tokamaks de taille moyenne (installation qui sert à produire une fusion nucléaire contrôlée) à avoir été sélectionnés par EUROfusion. De plus, l’installation de test SULTAN de l’Institut Paul Scherrer est le seul dispositif dans lequel les câbles supraconducteurs d’ITER ont pu être utilisés dans des conditions réelles.
La Suisse a par ailleurs apporté un savoir précieux dans le domaine des superordinateurs européens. Elle a participé à l’acquisition du superordinateur Large Unified Modern Infrastructure (LUMI), installé en Finlande et qui compte parmi les supercalculateurs les plus performants au monde. De même, elle a contribué à l’acquisition d’infrastructures similaires ailleurs en Europe, et donc à un accroissement de la compétitivité de l’Europe dans ce secteur.
Collaboration transnationale
L’excellence dans la recherche et l’innovation ne connaît pas de frontière. Elle profite intrinsèquement de la compétitivité mondiale et de l’intégration dans des réseaux de partenariats. La coopération transnationale apporte des avantages pour toutes les parties et montre qu’il est plus efficace d’avancer sur les questions scientifiques, les efforts en matière d’innovation et les défis sociétaux en mettant ses forces en commun.
Le présent article s’appuie par ailleurs sur les sources suivantes
- Effets de la participation suisse aux programmes-cadres européens de recherche, rapport 2019, Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation
- Données d’Ecorda compilées par le SEFRI
- Données de la Commission européenne compilées par le SEFRI